FULL CONTACT & KICKBOXING
               

Rétrospective Sébastien


    Suite à une grosse demande, j'ai décidé de faire un reportage spécial sur les premières années de Sébastien au club, certainement ses meilleures, où, dans une ascension fulgurante, Sébastien amenait les sports de combat à un niveau sans doute jamais atteint auparavant chez les jeunes.

A travers cet article et les vidéos qui l'agrémentent, j'ai voulu atteindre un certain nombre d'objectifs :

- Que ceux qui n'ont pas connu Sébastien jeune et qui n'ont vu de lui que ce que l'on pourrait appeler l'ombre de ce qu'il était, sachent qu'il a été, dans ses premières années, un champion extraordinaire et un véritable innovateur.

- Que les vidéos servent de modèles pour nos apprentis champions tant il y a de leçons à retenir de la manière dont combattait Sébastien.

- Je souhaite enfin que l'histoire de Sébastien, à qui tout le monde prévoyait un avenir hors du commun et qui a fini par s'éteindre peu à peu, serve d'exemple à tous ceux qui (tout sport confondu), considérés comme des prodiges, oublieraient un peu vite qu'une carrière se construit avant tout sur le travail et le mental.

         Sébastien : le clip (cliquer sur l'image)

    A une exception près (un combat junior), toutes les scènes de ce clip ont été tournées alors que Sébastien avait entre 11 et 15 ans.

                                    
 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

    L'histoire d'un prodige trop précoce

  Sébastien, aux côtés de son frère Kevin, respectivement 11 et 8 ans à l'époque :

                                

    Je ne sais pas trop s’il on peut dire que l’arrivée d’un  phénomène comme Sébastien est un bien ou un mal pour un entraîneur, mais ce qu’il y a de certain c’est qu’après son passage, plus rien ne peut être comme avant. Que restera-t-il de toutes ces années ? Des moments extrêmement forts, intenses, indescriptibles, dans la joie comme dans la déception d’ailleurs ; mais aussi le sentiment d’un immense gâchis, l’impression qu’il n’a pas accompli ce que son potentiel aurait dû lui permettre de réaliser.

    Il restera malgré tout un précurseur dans les sports de combat moderne, un prodige absolu qui, à mes yeux, n’a pas encore trouvé son équivalent chez les jeunes. C’est sur ce point que j’aimerais insister car ceux qui l’ont connu sur le tard ne peuvent avoir conscience de ce qu’il a réellement représenté durant ses premières années, entre l’âge de 11 et 15 ans plus particulièrement. Et aussi parce que son histoire, celui d’un gamin incroyablement talentueux qui finit par craquer, est exemplaire même si beaucoup d’entraîneurs en soutiendront la banalité. Pourtant avec Sébastien, croyez moi, rien n’est jamais vraiment banal !

    J’ai souvent raconté qu’à la seconde même où j’ai vu Sébastien pour la première fois, un petit blondinet tout frêle de 11 ans à peine, presque anachronique dans le monde très difficile et impitoyable des sports de combat, j’ai eu une vision prémonitoire : l’impression partagée d’être à la fois devant un phénomène qui allait bouleverser la vie du club et du kickboxing chez les jeunes, et un sentiment inexplicable qu’une cascade d’ennuis allaient me tomber dessus. Pourtant j’en avais vu passer des Van Damme en herbe, mais lui c’était différent. Je le sentais tout de suite avant même de l’avoir vu exécuter son premier coup de pied. La confirmation vint très rapidement : il comprenait tout au quart de tour et faisait tout plus vite et plus fort que les autres. Ayant plusieurs années de karaté derrière lui, il avait de bonnes prédispositions. Mais il fallait aussi lui retirer les nombreux défauts inhérents à la pratique du karaté ce qui est généralement assez compliqué. Pour lui, pas de problème ! Il s’adaptait à une vitesse incroyable.

    La deuxième chose qui retint mon attention pendant les premières années de ma « collaboration » avec Sébastien, c’était son sérieux à l'entraînement : il faisait (à l'époque !) absolument tout ce qu’on lui demandait sans jamais broncher, même les choses les plus difficiles. Ca en devenait presque effrayant car ce tout petit gamin était progressivement en train de devenir l’une des plus impressionnantes machines à détruire que l’on ait vues. Ses adversaires qui ne le connaissaient pas rigolaient en le voyant. Ils riaient en général beaucoup moins après quelques secondes de combat, à une époque où les compétitions avec coups portés à pleine puissance étaient encore souvent autorisées chez les jeunes. Sébastien ne battait pas ses adversaires, il les exécutait avec un relâchement presque inhumain. A son apogée (vers l'âge de 14 ans) son visage très calme ne laissait apparaître aucune émotion pendant le combat, rappelant étrangement celui de Fedor aujourd’hui. Quant aux adversaires qui partaient très décontractés en voyant ce petit blond a priori bien inoffensif qu’ils avaient en face d’eux, la peur se lisait très rapidement dans leurs visages après quelques secondes de combat. Certains des combats de Sébastien, enfant, firent d’ailleurs scandale devant les dégâts causés à ses adversaires, ce qui précipita probablement le passage au light contact imposé en France pour les jeunes aujourd’hui.

    Techniquement, stratégiquement, la manière de combattre de Sébastien, à l’époque, était révolutionnaire et pourrait servir d’exemple même aux meilleurs des professionnels d’aujourd’hui. Perception, anticipation, temps de réaction au centième de seconde. Sébastien lisait dans vos pensées. Il savait déjà pratiquement ce que vous alliez faire avant même que vous ne l’envisagiez vous-mêmes. Un comble ! Imaginez jouer aux échecs avec quelqu’un qui aurait toujours un coup d’avance sur vous ! Parfaitement équilibré, utilisant au millimètre près chaque parcelle de son corps si léger pour donner le maximum de puissance, chacune de ses techniques frisait la perfection. Tellement esthétique que même ceux qui étaient allergiques aux sports de combat étaient sous le charme. La puissance de Sébastien ? Quand j’ai compris que j’avais à faire à un gamin qui avait un potentiel de fibres rapides aussi élevé, je l’ai fait travaillé d’une manière très particulière, faisant beaucoup appel à la plyométrie bien avant de le mettre à la musculation avec charges. Quand il frappait au pao, cela faisait tellement de bruit dans le gymnase que l’on avait l’impression que c’était un colosse de 100 kgs qui était en action. La surprise était grande quand les gens découvraient à qui ils avaient à faire.

    Et d’un point de vue stratégique, c’était une véritable leçon à montrer dans toutes les écoles ! Quand vous expliquez à un gamin (et même à un adulte) d’utiliser les déséquilibres de l’adversaire pour l’attaquer, vous pouvez être sûr que vous serez à 90% incompris. Pourtant Sébastien avait tout pigé. Tellement bien d’ailleurs qu’il était devenu une référence en la matière, inégalé à mon sens à ce jour. On aurait pu le prendre pour une sorte de singe savant, un robot perfectionné, s’il n’y avait pas eu, par-dessus le marché, une grande dose de créativité en lui. Au bout d’un moment, même son propre entraîneur qui lui avait tout appris se demandait : qu’est-ce qu’il va bien nous sortir ? Avec lui, tout devenait possible : on pouvait inventer des nouvelles techniques, des nouvelles stratégies. Il avait, lui seul, cette possibilité de comprendre, assimiler, appliquer, et même transcender ces nouveaux domaines.
 

    Puis un jour, Sébastien est redescendu sur Terre, lui qui était pratiquement considéré comme un extraterrestre autrefois. Certains diront qu’il est simplement devenu humain, quelqu’un comme tout le monde, connaissant le doute, le manque de confiance alors que pendant toutes ces années il avait paru complètement inébranlable, tellement sûr de son talent que cela en devenait presque insolent.

    Le grain de sable qui a enrayé cette belle mécanique, je le connais. Sébastien le connaît aussi. Et l’explication est loin d’être aussi simpliste que celle à laquelle on pourrait penser (sorties, filles etc …) Mais cette explication est évidemment personnelle à Sébastien donc je ne m’étendrai pas dessus. A partir de l'âge de 16 ans et jusqu'à aujourd'hui, la carrière sportive de Sébastien a connu des hauts et des bas. Certes il y a quand même eu un certain nombre de coups d'éclats qui prouvaient que, quand il était bien dans sa tête, Sébastien restait toujours un phénomène. Je pense en particulier aux championnats du monde de 2002 où il m'a complètement bluffé : quand on a appris en Italie que, malgré qu'il ne soit qu'un junior première année en France, il combattrait dans la catégorie senior selon les règles de la WKA, avec les meilleurs amateurs mondiaux, j'ai craint le pire. Connaissant le mental de Sébastien, j'ai bien pensé que ce serait une mission impossible pour lui. Pourtant, ce jour là, il y croyait (et il était bien le seul !) Les combats qu'il a fait étaient "énormes" et ça, personne ne pourra le lui retirer.

    Je pense aussi à quelques combats magnifiques, en catégorie junior, ou encore dans sa finale de championnat de France de kickboxing en 2004, une impressionnante démonstration ! Et à côté de cela, des combats où il passe complètement à travers, quand il ne refuse pas tout simplement de monter sur le ring. Cela met bien en lumière un aspect de la personnalité de Sébastien qui est apparu en grandissant : une sorte de double personnalité. Pendant plus de 10 ans, on m'a tellement assimilé à lui (je ne pouvais plus aller nulle part sans que l'on me demande des nouvelles de Sébastien) que certains moments ont été, il faut reconnaître, assez durs. Mais si je n'ai pas toujours bien compris son comportement, je n'ai jamais voulu le dénigrer : j'étais avec lui dans les meilleurs moments, je ne l'ai jamais lâché dans les pires.

    Aujourd'hui, Sébastien a arrêté complètement la compétition. Il est pourtant encore bien jeune. Il m'a exprimé sa volonté de remonter sur un ring un peu plus tard, pensant avoir évolué dans sa mentalité. Ce serait certainement très intéressant mais, connaissant les antécédents et le "personnage", je n'y crois guère. Cependant il reste à l’intérieur de Sébastien une flamme, même profondément enfouie, qui est celle de son génie demeuré intacte.


    Sébastien : les moments clés entre 11 et 15 ans

    Si Sébastien a suscité l'admiration de beaucoup de monde pendant la période où il combattait à son meilleur niveau, il a aussi fait l'objet d'une certaine jalousie et il a notamment été pris en grippe par (une partie) du corps arbitral de l'époque, sans doute parce que trop brillant. C'est un peu regrettable d'ailleurs qu'une fédération comme celle de full contact, pour ne citer que cet exemple précis, n'ait pas été capable de soutenir un talent unique comme celui de Sébastien et, bien au contraire, lui ait un peu barré la route à travers des décisions plutôt étonnantes comme on le verra plus bas.

    La municipalité d'Evry aura également mis beaucoup (trop ?) de temps à reconnaître le mérite de Sébastien qui a quand même amené à la ville un titre de champion du monde, 5 titres de champion de France, 2 coupes de France et une dizaine de titres régionaux.

    Saison 1994 - 1995 : ce sont les débuts (fracassants) de Sébastien, alors âgé de 11 ans et pesant 33 kgs. Excepté un combat amical de début de saison où il est blessé au poignet, il remporte tous ses combats et devient champion de France de kickboxing. Son style rapide et spectaculaire le démarque déjà des autres.

    Saison 1995 - 1996 : A 12 ans, l'intelligence tactique de Sébastien surprend. Ses aptitudes techniques sont incroyables pour son âge et sa précision chirurgicale commencent à faire de gros dégâts sur ses adversaires, malgré son poids très léger. Il confirme sa suprématie en kickboxing en remportant pour la deuxième fois d'affilée le titre national après avoir surclassé tous ses adversaires. Un seul point noir : la finale du championnat de France de full contact, à Donges, perdue (sans doute très injustement) contre le boxeur local Axel Guiheneuf (voir plus loin).

    Saison 1996 - 1997 : Une période de transition où Sébastien semble un tout petit peu moins dominateur. Il remporte malgré tout l'intégralité de ses combats à l'exception du premier tour du championnat de France de full contact où les juges le donnent perdant parce qu'il a fait pleurer son adversaire au bout de quelques secondes. Une décision vraiment ridicule mais qui commence à peser sur le moral de Sébastien.  Il abandonne d'ailleurs (très provisoirement) la boxe pour le football avant la fin de saison, ratant ainsi le championnat de France de kickboxing qu'il aurait sans doute remporté pour la troisième année de suite.

    Saison 1997 - 1998 : l'apogée de Sébastien vraisemblablement. Sébastien change d'avis et revient à son sport de prédilection plus déterminé que jamais. Il commence la musculation et sa puissance devient rapidement assez impressionnante. A 14 ans, lors d'un interclub à Paris, il détruit littéralement un adversaire âgé de 3 ans de plus que lui. Nous faisons l'impasse sur le championnat de France de full contact et Sébastien concentre tous ses efforts sur le kickboxing. Du 1er tour du championnat d'Ile de France à la finale du championnat de France à Nice, Sébastien remporte tous ses combats avant la limite. Son style arrive à maturité, le rendant unique dans sa façon de combattre et d'appréhender les déséquilibres de l'adversaire. Une leçon de stratégie mais pas à la portée de n'importe qui tellement elle demande une lecture rapide de chaque mouvement de l'adversaire.

    Saison 1998 - 1999 : c'est au cours de cette saison qu' a lieu un combat qui a certainement représenté un tournant pour Sébastien, alors âgé de 15 ans. Il affronte Samir Kasmi, un excellent boxeur, en finale du championnat d'Ile de France de kickboxing. Sébastien, qui avait déjà battu Samir un an auparavant, se détache nettement au fur et à mesure du combat et obtient même un knock down au deuxième round. Mais à 10 secondes de la fin, alors que la victoire de Sébastien ne fait aucun doute, il est compté par l'arbitre alors qu'il n'a semble-t-il même pas été touché : il a juste été déséquilibré en balayant son adversaire. Sébastien est donné perdant à l'issue de la rencontre et c'est un nouveau traumatisme pour lui. Il commence à se sentir "mal aimé" des juges et arbitres et ne s'en remettra jamais vraiment.
 


    Les vidéos :

    * Sébastien a été, dans ses premières années un grand, un très grand guerrier. Cela étonnera sans doute ceux qui l'ont connu plus tard mais il faut savoir qu'il a souvent eu à faire à des adversaires extrêmement agressifs et difficiles à maîtriser. Pourtant il s'en est toujours sorti de façon brillante et, même si sa technique était très supérieure aux autres, il a souvent été obligé de "sortir ses tripes", comme en atteste la finale du championnat de France kickboxing en 1995 à Gisors (il a 11 ans).

Finale du championnat de France de kickboxing 1995
 

    * La finale du championnat de France de kickboxing 1996, remportée par Sébastien (12 ans), a fait scandale en raison de l'état de son adversaire à la fin du combat. Pourtant les deux combattants frappaient aussi fort mais Sébastien était juste beaucoup plus précis et rapide. A la suite d'un magnifique K.O. sur retourné au foie en fin de combat, certains ont demandé la disqualification de Sébastien. Après 10 minutes de palabres, les juges exigent finalement que Sébastien soit déclaré vainqueur.

Finale du championnat de France de kickboxing 1996 (extraits)
 

    * Cette finale du championnat de France de full contact 1996 à Donges (Loire Atlantique) est restée un traumatisme pour Sébastien. Il rencontrait la "star" locale, Axel Guiheneuf, et le fait que deux des trois juges étaient du coin ne lui a certainement pas facilité les choses. Son adversaire était, il faut le reconnaître, un excellent combattant mais Sébastien, malgré un torticolis contracté ce jour là, était encore au-dessus. D'ailleurs Axel doit s'arrêter à plusieurs reprises dans le deuxième et dernier round à cause des coups de Sébastien et parce qu'il saignait abondamment. Pourtant l'évryen a été donné perdant à deux juges (devinez lesquels !) contre un. Un grand sentiment d'injustice pour Sébastien. Malgré tout, le combat a été magnifique : on vous laisse juger vous-mêmes.

Finale du championnat de France de full contact 1996 (extraits)


    Sébastien a livré de nombreux combats d'anthologie dans sa jeune carrière et, malheureusement, il m'en manque beaucoup dans mes archives vidéos. Si quelqu'un en avait quelques traces, nous serions très reconnaissants de bien vouloir nous le signaler.



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